mardi 30 septembre 2008
MARS ATTACK, la der des der?
Même si le phénomène sévit pour l’instant en dehors des sphères roots du Reggae, ce blog a pour devoir de vous raconter ce long week-end éprouvant que vient de vivre le Docteur…
Fêtant son dixième plateau dans leur enceinte du J-4, Marsatac peut se targuer d’être devenu un festival de référence, avec une organisation toujours aussi irreprochable, le soutien de nombreux projets musicaux, et une programmation innovatrice à chaque fois. Cette année, Dro, le concepteur du Festival, qui connaît bien l’Afrique (pour y avoir d’abord vécu), a voulu mixer les sons acoustiques de la scène de Bamako, avec la crème technologiques de créateurs électros de la scène marseillaise. Après une résidence là-bas, où chacun a du se soumettre aux règles de travail de l’autre, l’heure était venue à la confrontation en Live : Le premier essai raté à Aubagne laissait présager un manque de cohésion qui ne s’apprend qu’en répétant plus souvent, Alif Tree peut donc affirmer sans se tromper à un journaliste de RFI que c’était là leur meilleure prestation ! La confrontation de ces deux Cultures ayant déjà bien mieux fonctionné dans le passé (Galliano & the African Divas, ou Ba Cissoko & Ivi Slan en sont deux très bons exemples), on peut rester optimiste sur l’avenir de cette création, voire interrogatif sur l’honnêteté de leurs objectifs propres, ou enfin douter sur le succés de ce rapprochement musical, aussi différent que ce continent qui nous sépare…
Mais elle a été surtout le prétexte à une première soirée 100% Afrique, avec Manu Dibango le doyen, qui a ouvert le bal. Avec des structures musicales de morceaux assez longues, et en puisant dans l’endurance de ses très surs acolytes, son sax a donné la cadence et reste solide malgré le temps. Sur des rythmes plus proches de ses racines et de son pays, la Côte d’Ivoire, Manu n’a pas voulu surfer dans la facilité de son répertoire à succès, en oubliant volontairement (?) de nous les chanter : Peu importe, il a intelligemment clôturé son show par « Reggae Makossa », qui nous a rappelé son appartenance à cette musique, et ce à sa meilleure époque. Il me confiait il y a quelques années, qu’il avait alors pris la place toute chaude du studio, et même ses musiciens, à Serge Gainsbourg (qui finissait alors « Mauvaises nouvelles des étoiles), alors vous n’imaginez pas l‘ambiance à Kingston en 1980, et la Jam session qui s’en ait suivie!!
Fela Kuti, l’autre géant de la musique Afro de l’époque (celle où cette musique a été enfin percue par le public Français avant d’être classée World) était lui aussi représenté, son fils Seùn ayant invité des membres de son groupe d’origine, les Africa 70, un guitariste qui n’a pas laissé une impression sérieuse et SURTOUT Tony Allen, le batteur … Le rythme entier du spectacle sera davantage soutenu, même lorsque le batteur n’était pas derrière ses fûts ! L’ombre de son père qui planait sur les docks l’an dernier s’en est allé, les reprises de ses morceaux avec, pour laisser extérioriser l’énergie du chanteur. Mais Seun n’est pas Femi (et Femi d’ailleurs, que devient t-il ?) et ne possède pas tout son charisme, et sa propre identité. Le public lui s’est rapidement familiarisé avec ce rythme unique d’Afro Beat que seul le clan Kuti maîtrise. Comme Il s’est d’ailleurs laissé aussi facilement porté par les platines d’un célèbre DJ (Gilles Peterson), ce qui indique son degré de connaissance vu la faible prestation de ce pousseur de galettes pourtant habitué à sortir des cd de Mix à la hauteur. A l’époque (toujours la même), Fela nous avait carrément pétrifié sur place, avec deux uniques morceaux de 45 minutes chacun et un band de plus de seize musiciens et danseuses! Un concert anthologique, à coté du Stade Vélodrome, le 03 décembre 1983, qui m’avait ouvert la porte à toutes les autres musiques (et « La musique est l’arme du futur » disait l’affiche de sa tournée…), et avait même fait s’interroger mon paternel, attendant vainement la fin d’un morceau qu’il entendait de l’extérieur, pour pouvoir venir me chercher…
Revenons à ce week-end :
La programmation du lendemain était nettement plus attendue et entendue, une nuit Hip-Hop avec De la Soul en tête, et en pays conquis, et d’autres fleurons attendus comme Hocus Pocus, ou Foreign Beggars : Super réponse positive du public, même pour les voix « Drive beat » de Bauchklang. ou encore la punk attitude de Saul Williams, cette fois en band avec guitare et claviers en plus de son scratcheur fou habituel), et avec toujours ce look pas possible et cette musique invraissemblable, qui en fait un digne héritier du mouvement punk, qui explosait… toujours à cette même époque, la toute fin de années 70 !!
Sûrement pour moi le meilleur concert, mais l’avis ne sera pas partagé : Entre les derniers défenseurs du Roots qui suivent encore les délires tout gentils d’un Patrice débarrassé de ses guitares pour croiser le regard de ces midinettes conquises d’avance, ceux qui ont eu la chance d’applaudir pendant quelques minutes un jeune DJ de 16 ans qui a mis le feu (TC ?) et surtout ceux qui attendaient le flow hip-hop des DJ de De la Soul, sur des morceaux d’il y a quinze ans maintenant, le vrai public reggae n’avait réellement pas sa place. Si le troisième soir permettait de se faire une dernière cure de jouvence, et s’imprégner encore de l’ambiance du festival, cela aurait du faire la place à des Dub Sessions par exemple, pour ainsi faire le tour complet de la question (et surtout faire plaisir au crew de Musical Riot !). Au delà de ce rapport en demi-teinte sur les artistes que l’on a pu découvrir à ce Festival, Marsatac a su malgré tout encore su plaire (près de 12 000 le deuxième soir), tout en respectant l’affiche et le timing ! Allant même vers une certaine originalité dans les stands, et en faisant participer les sponsors (la célèbre marque de Jeans !), ce seul festival 100% marseillais (avec la Fiesta des Suds) a même pointé son nez sur le débat écologique, recyclant partiellement, chose déjà intégré pleinement à de nombreux festivals d’été, On ne peut donc dire que bravo, et espérer que le Reggae saura lui aussi se faire la part belle à ce festival, ce que n’a d’ailleurs pas démenti Dro dans un interview pour Ventilo… De toute façon, pas de concurrence, cette musique n’est pas non plus présente dans les prog’ habituelles de la Fiesta des Suds, et cette année ne sera pas en reste, avec toutefois la venue de Calypso Rose (attention, on en reparle bientôt…)et celle de Ba Cissoko, autour de Trust ( !!!), Bashung, Omara Portuando, Richie Havens, et Herbie Hancok. D’autres pointures pour une autre ambition certes, mais toujours une bonne occasion de faire la fête, de tenir le pouls actuel des musiques du Monde, de rester en bonne santé, et ne pas s’endormir en attendant que Jah vienne nous délivrer…