Lecteur assidu de N.D. depuis ses premiers numéros en noir & blanc, je me décide enfin à adresser au courrier – forum des lecteurs mon sentiment, suite à la lecture du seul article jamais publié en Français ( ?) sur Jacob « killer » Miller…C’est bizzare que personne ne dresse de critiques à l’encontre de cette « bio » de surface très brouillon, seul l’absence de crédits photos a été relevée jusque là. En étant publiée un peu moins dans la hâte (c’est bientôt le 30ème anniversaire de sa disparition, non ?...), elle aurait pû vous en apporter plus ! Allons y pour une relecture… C’est drôle par exemple de lire que l’album « Reggae Thing » de 1976 est anecdotique quand c’est par lui que j’ai découvert cet artiste (en 1982) et tant pour moi il recèle uniquement de pures chansons : Deux seules reprises (non ré enregistrées, comment dire qu’elles sonnent moins bien ?....),
l’énergie de "Ghetto on fire", l’esprit cool de "Groovin’", des titres signés Chinna Smith (comme 80 000 careless ethiopians, pas moins) le piano de Pablo, le hit "Jah music"ou le militant " Roman soldiers of Babylon"... De la pochette (si, si) aux lyrics (édités à l’interieur du vinyl), c’est surement un des meilleurs albums de Inner Circle. Question de goût ? Pas sur, tant « Ready for the world » qui contient aussi des perles ne vous a pas touché… Les avez-vous seulement écouté avant d’en parler, ou avez-vous sur eux une conclusion toute faite étant sortis par des majors… Dire que leur musique est « cross-over » (plus que Marley !) est aberrant quand on voit ce qu’ont fait les Jamaïcains des rythmes us depuis la Fondation Ska, c’était plus un cross-back, car on disait à l’époque : La différence entre un musicien américain et jamaïcain, est que le yardie
peut tout refaire mieux qu’eux, là où l’américain n’arrive même pas à copier un Reggae roots (citation Gainsbourg)! … Là où l’on peut aimer ou pas, on est obligé de ne pas dire n’importe quoi… Rien de pop dans cet album qui montre (et explique au verso du LP) l'essence de la "Reggae thing". Si vous vous attardez sur ses relations avec Chris Blackwell et Pablo, ces stéréotypes et vos phrases toutes faites manquent sérieusement d’analyse. Comment pouvions nous envisager un « killer » album Miller-Pablo-Blackwell en 75 alors que ces quelques singles (pas seulement ceux cités, d’autres duos apparus ensuite sous Trojan, comme l’excellentissime Irie Feelings de Rupie Edwards) n’ont pas décidé Island d’en faire un champion ? Sans imaginer le placer comme un quelconque remplaçant à Bob, ils ont juste « découvert » sa face Dub, laissant Jacob filer sur une autre major, avant de repasser par Island gràce à Rockers,
pour ne jamais aller plus loin… L’époque Marley sous Chris Blackwell n’étant pas la meilleure non plus, disent les plus courageux, alors cet album imaginé n’aurait peut-être pas été si « killer » que ca… Dire que le patron d’Island voulait mettre le nom du lead vocal devant le nom du groupe (comme Bob & the Wailers) est faux, il n’a pas fait cela pour Black Uhuru, Third World ou Burning Spear, que je sache ?... Jacob Miller a eu une série de succés locaux AVANT de rejoindre le groupe (l’aide apportée par Niney, Blackbeard ou Bunny Lee, vous connaissez ?...). S’il a continué de signer de son nom certains titres de Inner Circle, c’était uniquement pour rallier ses fans de base qui le suivaient déjà (source : Steve Nye), tout en signant un contrat exclusif avec une major... Parler de cette double carrière (en solo ou en groupe) aurait été un axe intéressant de l’article, mais en allant chercher le témoignage des membres du groupe, et en citant le travail conséquent de Bernard « Touter » Harvey, les premiers soutiens de Tommy Cowan (où l’on retrouve Pablo),
ou les efforts Dubs de la section Fatman Riddim (Is it war or Peace, ou tribulation Dub pour n’en citer que deux…). Au lieu de cela vous citez la pochette de Natty Christmas (certainement pas choisie par Jacob), et ne comprenez pas la « blague potache » autour de l’herbe qu’il jamme (sur la scène du Sunsplash 78 plus vraissemblablement qu’à celle du Peace concert) en s’entichant d’une casquette de flic… Remettez les choses à leur place, revoyez l’extrait, comme celui de Rockers (le ROLE qu’il y joue ne doit pas être interprété comme allant dans le sens de Dillinger,
Gregory Isaacs n’est pas dépanneur de clés pour les touristes, non plus?...). Sa courte carrière (6 ans) n’est pas défrichée et trop vite déroulée, sans trouvaille comparative avec celle de Bob. Lee O’Neill a d’ailleurs été plus loin en soulignant (sur reggae archives) l’énergie du premier au détriment de la noirceur «
claustrophobique » du second, lors de ce concert historique et du geste révolutionaire et populaire de Jacob Miller (réunissant les deux chefs de Gang), que n’a pas retenu la version officielle des deux partis PNP et JLP, préférant montrer Bob tenant la main des deux leaders de partis... De plus, sa fin tragique avait été à l’époque traduite comme un « meurtre » par de nombreux témoignages car ses freins auraient été trafiqués (y a-t-il eu même une quelconque enquête), tant est si bien qu’en France on a d’abord eu la nouvelle de son assassinat avant d’avoir les conclusions hâtives de cet acci
dent. Alors, complot de labels ou de gangs, il faudrait y voir plus clair, trente ans après…
Question discographie, je rajouterai volontiers la compilaton Trojan/Sanctuary paru en 2004, et qui recèle de trésors, avec principalement des titres cédés par Feu Tommy Cowan, et insisterait un peu sur les deux reprises de Bob Marley (3 O' clock, et Natty Dread) à ajouter à Burial, pour sa collaboration avec Augustus Pablo.
Dans les années 90, un "Songbook" de Jacob Miller où l'on peut entendre les hommages de Sanchez, Luciano Freddie Mc Gregor, et les dérives de Red Rat, sur des morceaux retapés pour l'occasion est sorti dans une quasi ignorance, puis plus tard, un mix tonitruant de King Tubby sur les standards du Killer a fait heureusement surface, et vous évité d'acheter les deux excellents (mais pirates) cd parus sur Esoldun...
Bref, que les détenteurs et critiques du magazine « Natty Dread » se mettent d’accord, c’est un journal d’opinion, libre de dire ce qu’il veut, de vous raconter son histoire, sa Vérité sur le Reggae. Mais il faut dans ce genre de forum dire aussi la sienne, surtout quand il s’agit d’erreurs ou de lacunes dispensant ce genre d’article d’être de référence pour tous les lecteurs qui veulent en savoir plus, comme moi, comme vous…
Sachant déjà qu’il ne fallait pas trop vous chatouiller,
je tentais seulement
- de remettre un peu les choses à leur place…
- de vous soumettre mon sentiment sur cet article !
- de vous faire admettre qu’il aurait mérité d’être un peu plus « travaillé ».
Je ne range pas systématiquement tout ce que je lis à coté de la Bible, (c’est une image bien sur !), je préfère vérifier d’abord... Un exemple m’a fait sourire : On ne sait pas exactement la date de naissance de Jacob Miller (on s’en fout d’ailleurs) ; la plus recensée est le 4/05 - Yannick Maréchal donne le 23/03, se trompant avec sa date de décés ! - de l’année 1952 ou 1955, voire 1956 ou 1958 d’après un interview au Rockers shop de Pablo. Vous pouviez donc difficilement savoir la Vérité, mais de là à citer deux dates différentes (sur la couv’ et dans votre magazine)… Sans employer de conditionnel (!), vous répondez assurément dans ce forum l’année 1954 : Tiens, on nous l’avait jamais sortie celle-là !
Je n’essayais donc pas de minimiser un travail évident : Si vous ne connaissiez pas le reggae, je ne vous lirai pas
depuis le début !... J’ai dévoré comme tous les passionnés cet article, mais je me demandais seulement : Quand le single « Baby I love you so » est sorti, la patron d’Island savait–il qui était Jacob ? Vous avez dû apprendre dans ce même interview qu’il ne connaissait même pas Bob Marley avant de le rencontrer dans ses bureaux d’Angleterre en 1973… Mon pote Chris m’en a parlé encore hier, et m’a d’ailleurs laissé la photo dont il vos a parlé, sur l’avion… Si vous voulez la voir…
Avez-vous enfin écouté les albums de Inner Circle sur la major US Capitol ? Alors, pas de faute de goût ? Lloyd Bradley les met aussi au top de la discographie du groupe, vous savez ? C’est vraiment drôle, mais toujours dans ce même interview que vous citez, Chris parle de relations qu’il avait avec Capitol USA, dès 1970 ! De là à dire que la signature de Inner Circle s’est faite grâce à lui, il n’y a plus qu’un conditionnel à mettre…
Quant aux rumeurs sur son décés, je n’avais pas à faire ce travail de journaliste, ne l’étant pas pour votre magazine… Je me contente de vérifier après vous lire, et avant d’écrire mes articles sur un blog… Sur ce génial artiste, j’aurai insisté sur son poids (sans jeu de mot) et sa place dans
la Reggae : C’était la voix du peuple jamaïcain de la fin des années 70. Dur de savoir que vous mettez ses textes à la cheville de Bob, ils sont pour moi au firmament rasta, au sommet du roots, plus engagé et ancré à Yard que quiconque à cet époque : « Can’t even be free ina own land, the wicked, they turn it to battleground, can’t even smoke our little ily, let’s sing praises unto Jah RastafarI…. » [© penetrate music]. De quoi l’éliminer lui aussi ?
Au fait pour cet interview de mon poto: © 2009 Brant Publications, Inc. Gale, Cengage Learning- le journaliste est Hooman Majd, et on le trouve facilement sur le net en Anglais, mais je pense qu’on peut facilement en demander l’autorisation de le traduire... X-Ray sur le forum Natty Dread